L'Alpscoach

Après avoir été embarqués par deux amazones en talons et en baskets, après être montés dans le sac à dos d’une famille d’aventuriers, ce troisième épisode va nous porter en terre bretonne, au pays du kouign-amann, du Marquis de Sade (le groupe de musique, bien sûr), de Bernard Hinault, sur cette terre où les menhirs font écho au bon et au bien vivre.
Je dois vous prévenir dès à présent : aujourd’hui, nous allons parler sport ! Car mon invité a non seulement l’activité physique en passion mais également en métier. Alors si le dépassement de soi ne vous parle pas, si le sport est pour vous uniquement télévisuel, vous allez aujourd’hui avoir un choc, comme le jour où vous avez entendu les premières notes de « You shook me all night long » jouées par le maestro Angus Young.
20h30, j’allume mon Teams. Devant moi, apparaît un beau gosse en survêtement, les cheveux légèrement en pétard, le visage taillé à la serpe, les mâchoires bien apparentes, le physique affuté comme un garenne. Le ton est donné. Je sens que je vais devoir mettre quelques dents supplémentaires si je veux suivre le gaillard ! Le meilleur moyen de me mettre dans sa roue va être de le laisser prendre la tête et de rester bien à l’abri… « Je m’appelle Kévin, j’ai 27 ans, je suis en couple avec Juliette depuis 10 ans et je suis papa d’un petit Gabin d’un an et demi. J’habite au sud de Rennes, dans la grande métropole ». Bon, en plus, il est jeune. Je vais devoir sortir le 52x12 si je ne veux pas faire l’élastique. Oh, Gabin, aide-moi, rappelle ton papa pour que je puisse prendre un peu d’avance…
« J’ai un métier à double tiroir : je suis coach sportif et formateur dans une Ecole de sport ». Quand je vous dis que nous avons affaire à un vrai sportif ! « Je suis coach sportif pour les entreprises et pour les particuliers. Je ne suis pas un coach pour un sport en particulier. Moi, ma spécialité, c’est l’activité physique. L’activité pour le corps. J’interviens pour les Femmes et les Hommes qui souhaitent perdre du poids, pour ceux qui veulent se réathlétiser après une blessure ou une grande période d’inactivité, pour les sportifs qui désirent se préparer physiquement à un évènement. Si je prends l’exemple d’un club de sports co, il y a l’entraineur pour la technique, la tactique. Et il y a le préparateur physique, pour l’athlète en lui-même. Je suis ce dernier, j’accompagne l’entretien et le renforcement musculaire du corps ».
« Quant à mon deuxième métier poursuit Kévin, c’est la transmission de ce savoir aux autres dans le cadre de leur formation. J’interviens à l’IRSS de Rennes. Il existe 6 instituts présents dans l’ouest de la France, de Caen aux Sables-d’Olonne. C’est à Rennes que j’ai fait ma formation de coach. Alors, j’ai voulu rendre aux autres ce que j’avais appris. L’IRSS prépare à trois spécialités. La première est l’activité de la forme, c’est la formation pour être coach. La deuxième spécialité est l’activité pour tous qui conduit ensuite à être éducateur sportif. C’est généralement dans les sports co que l’on rencontre ceux qui ont suivi cette formation. Enfin, il y a l’activité aquatique et nautique. Là, c’est pour être maître-nageur. L’institut conduit au brevet professionnel, en un an, en alternance. Seulement, sachant que le concours est exigeant, challengeant, l’école propose une remise à niveau en 1 an l’année précédant la formation. Une remise à niveau physique et une remise à niveau théorique sur le sport dans sa globalité. C’est dans ces deux segments que j’interviens ».
Très vite, j’ai compris que Kévin était un passionné de son métier. De ses métiers. Et pour être si engagé, je n’avais aucun doute sur son appétence pour le sport. Pour tous les sports. Pour lui. Il fallait donc que j’aille creuser, que je rembobine le fil de l’histoire comme le dit si bien Arnaud Manzanini dans son podcast Ultratalk. Oui, je l’avoue, pour la prochaine question, Arnaud, j’ai usé du « pomme-C / pomme-V ».
« Kévin, enfant, étais-tu déjà sportif, comment est née chez toi cette passion pour le sport ? Kévin, quel enfant étais-tu, comment en es-tu venu à ce que tu es aujourd’hui ? »
« Petit, j’étais plutôt solitaire, j’habitais en campagne » commença Kévin. « Je faisais du VTT et du vélo de route. Pour avoir des copains, comme beaucoup, je me suis mis au foot. Et j’ai été tout de suite mordu. J’ai commencé à 5 ans et le foot va faire partie de ma Vie jusqu’à 17/18 ans. Dans toute cette période, je n’ai pas loupé un entrainement, un match. Mes potes se moquaient de moi, il me le faisait remarquer. J’ai même eu la chance d’intégrer une seconde en sport-études foot à Pontivy. Avec des entraîneurs qualifiés pour s’occuper de nous, pour nous faire progresser. On pouvait vraiment pousser, aller plus loin. Mais là, j’ai aussi découvert un monde sournois, un monde de fils à papa, un monde où la réussite passait parfois, souvent, par le réseau des connaissances des parents. J’ai été déçu et j’ai choisi de m’éloigner de ce monde qui ne me plaisait pas.
Ensuite, j’ai repris avec mon cousin le club de foot de mon village. Mais avec les études, j’ai du tout stopper. Je me suis vite rendu à l’évidence : je ne voulais plus pratiquer de sports collectifs, je voulais un sport où je pourrais faire parler mon corps, sa mécanique. Alors, je me suis mis à la course à pied. En format court car j’aime le speed, me confronter au chrono. Je me suis lassé, j’avais envie de voir autre chose ».
Chers lecteurs, j’espère que ça va toujours pour vous, que vous n’êtes pas trop fatigués. Car on n’a pas fini, je vous le dis… Quand je vous disais que mon invité aimait le sport dans toutes ses composantes. Tous les sports. Allez, je vous autorise à faire une pause, à prendre un petit gel et quelques gorgées. Vous êtes prêts ? On retourne voir Kévin.
« Après le run, j’ai voulu me mettre au tennis. Cela n’a duré que 6 mois. Ce n’est pas pour moi. J’avais un copain qui faisait du triathlon alors je m’y suis intéressé. Et rapidement, j’ai adoré. J’ai voulu tester, j’ai donc décidé de pratiquer. Sauf que je n’étais pas encore bien remis de ma blessure à l’épaule que j’avais contractée lors de mon dernier match de foot. Sur un tacle. La mauvaise chute. Et là, avec l’enchainement du vélo et de la natation, le ligament a sauté. Opération. Immobilisation. Deux mois. La patience, pas simple.
Quand tout a été cicatrisé, je me suis inscrit dans un club de triathlon. La première année fut tellement difficile. Remettre le corps en marche. De plus sur un triptyque natation – vélo – course à pied. Mais j’avais l’envie, je voulais me surpasser. Je n’ai rien lâché. Je crois avoir un gros mental, ça aide dans ces moments-là.
La deuxième année, j’ai commencé à prendre du plaisir physiquement. J’essayais de tout combiner, ma vie de Papa avec l’arrivée de Gabin, ma vie de couple.
STOP.
Je ne peux pas inviter un sportif de ce niveau sans aborder ce qui est pour moi notre plus grande chance. Notre équilibre. Une des clés de notre réussite, si ce n’est la première. J’ai nommé notre conjoint(e). Je m’explique.
Commençons par une petite précision pour ceux qui ne me connaissent pas. Si je me permets d’écrire « notre », c’est que je connais personnellement ce sujet. Etant un ultra sportif depuis plus de 20 ans, je sais à quel point la présence, la patience, la tolérance de mon épouse est importante. Prépondérante. Indispensable. Fondamentale. Car conjoint(e) de sportif amateur dans un sport d’ultra, ce n’est pas simple du tout.